La famille vidéo, Studio Panten à Kôln
Une de ses amies mettant en vente son appartement donne à Fred Forest l’idée de réaliser une installation vidéo.
Une de ses amies mettant en vente son appartement donne à Fred Forest l’idée de réaliser une installation vidéo.
Dans cet appartement, tout à fait vide, sous la forme de 4 moniteurs qui représentent une mise en scène de cette famille avec le Père, la Mère et les deux enfants, il préenregistre la discussion des parents dans la salle à coucher, de la fille dans la salle de bain et de Fabian le Bébé qui pleure sans arrêt dans sa chambre. Simultanément il publie dans la chronique immobilière du Kölner Stadt-Anzeiger, une série d'annonces :
- Première provocation : par rapport aux usages conventionnels de l’immobilier, le texte de l’annonce propose aux amateurs une visite pour assister au « parfait bonheur en famille ».
- Seconde provocation : Forest qui mène son action au titre de l’art, adresse simultanément une invitation spécifique au public culturel comme le ferait une Galerie pour cette exposition.
Les deux publics qui se rencontrent dans les lieux échangent des informations pratiques où leurs préoccupations d’ordre social se superposent d’une façon toute naturelle.
Une fois de plus Forest innove en intervenant d’une façon créative sur les canaux de communication sociaux pour en bouleverser d’une façon inédite les fonctionnements.
Concept
Dans un grand appartement vide, en instance de location dans un quartier résidentiel de Cologne, Fred Forest installe une famille fictive : " La famille vidéo ". Chacun des cinq membres de la famille est incarné par un moniteur vidéo, mis en situation dans une des pièces données. L’écran de T.V. en tant que symbole dominant, trône dans la salle à manger/salon fonctionnant en continu, diffusant le programme d’ARD, la première chaîne nationale allemande. Répartis dans les autres pièces de l’appartement, moniteurs avec leurs écrans et magnétoscopes sont posés à même le sol, sur le plancher. L’espace du lieu, rappelons-le est vide de tous meubles et accessoires. Simultanément, l’artiste publie dans la presse nationale et locale des annonces dans la rubrique immobilière. Ces annonces invitent les éventuels candidats, avant location des lieux, à venir constater de visu, le vrai bonheur de la Famille Vidéo sur place. Des horaires de visite sont donnés. Des candidats intrigués et de nombreux curieux, attirés par le caractère insolite de l’annonce se pressent sur place. L’artiste, caméra vidéo au poing, les reçoit sur place pour une visite des lieux…
Si, sur chaque moniteur le son est parfaitement audible, par contre les images sont volontairement floues… Cela pour favoriser assez l’imaginaire et la projection de chacun, pour que le visiteur soit amené à envier le " cathodique " parfait de cette famille idéale qui lui est proposé ici et maintenant ! Trop idéale, sans doute, pour ne pas tomber sous le coup de l’humour grinçant et corrosif de l’artiste… Dans le même temps et aux mêmes horaires le public du milieu artistique a été convié par un carton d’invitation comme il est de coutume pour les vernissages traditionnels. Sous une forme ironique le carton mentionne que désormais les artistes peuvent se passer des musées et des galeries, à la condition de disposer d’un appartement vide, de la présence dans un journal de la rubrique immobilière des petites annonces, de quelques téléviseurs.
Dispositif
- un appartement vide en attente de location
- six magnétoscopes Sony ACE-av 3670
- six moniteurs, grand écran, Sony
- un portapack Sony 1/2 pouce et sa caméra
- une série de petites annonces publiées dans la rubrique immobilière de Kölner Stadt Anzeiger
- " Leben der Familie Video ", E.Kluge, Kölner Stadt Anzeiger, 1 juillet 1976
- " La Famille Vidéo ", Communication et langages, N°33, Paris 1977
- https://www.persee.fr/doc/colan_0336-1500_1977_num_33_1_4378
Biographie longue de Fred Forest
Fred Forest a une place à part dans l’art contemporain. Tant par sa personnalité que par ses pratiques de pionnier qui jalonnent son œuvre. Il est principalement connu aujourd’hui pour avoir pratiqué un à un la plupart des médias de communication qui sont apparus depuis une cinquantaine d’années. Il est co-fondateur de trois mouvements artistiques : ceux de l’art sociologique, de l’esthétique de la communication et d’une éthique dans l’art.
Il a représenté la France à la XIIème Biennale de São Paulo (Prix de la communication) en 1973, à la 37ème Biennale de Venise en 1976 et à la Documenta 6 de Kassel en 1977.
EXPOSITION AU CENTRE POMPIDOU DU 24 JANVIER AU 14 OCTOBRE 2024